La pratique du yoga nous invite constamment à une attention, à un acte conscient qui nous mène à une présence totale à ce qui est, sans que nous venions toujours déformer la réalité parce que nous la voulons autre que ce qu’elle est.

La sensorialité n’est pas un empêchement à cette présence ; au contraire. Etre présent consciemment, c’est être présent à la réalité par ses sens, ainsi qu’à ses sens en éveil.

La connaissance sensible s’élargit sans cesse par l’expérience ou l’apprentissage et nous emmène vers nos sensations.

Dans la vie courante, nous n’additionnons pas des perceptions dans une sorte de synthèse permanente, nous sommes dans l’expérience sensible du monde. A tout instant, l’existence sollicite l’unité des sens : de toute évidence, nous ne nous étonnons pas de sentir le vent sur notre visage en même temps que nous voyons bouger les arbres sur notre chemin ; La rivière que nous voyons par nos yeux, si nous nous y baignons, nous ressentirons la fraîcheur sur notre peau ; quant au parfum des fleurs, nous le humons, et nous pouvons entendre au loin le son de la cloche du village.

Les sens concourent ensemble à rendre le monde cohérent et habitable. Ils nous révèlent donc notre existence.

Merleau Ponty subordonne l’ensemble de la sensorialité à la vue, d’autres l’établissent sous le règne du toucher. Dans son livre « les saveurs du monde » David le Breton nous précise : « La peau est le territoire sensible qui réunit sur son pourtour l’ensemble des organes sensoriels sur le fond d’une tactilité qui a souvent été présentée comme l’aboutissement des autres sens ; la vue serait alors un toucher de l’œil, le goût une manière pour les saveurs de toucher les papilles, les odeurs un contact olfactif et le son un toucher de l’oreille. La peau est un liant, une toile de fond qui rassemble l’unité de l’individu. Exister, c’est en permanence affiner ses sens, les démentir parfois afin de s’approcher au plus près de la réalité ambigüe du monde ».

Dans le hatha yoga, tous les centres d’énergie (chakras) sont en relation avec nos sens :
Le sens associé à Muladhara est l’odorat (nez) et son organe d’action est l’anus ; celui de Svadisthana (relié au plexus nerveux utéro-vaginal ou prostatique) est le goût (lié à la langue) et son organe d’action sont les organes sexuels, les reins et le système urinaire ; celui de Manipura est associé à la vue (les yeux) et les pieds sont l’organe d’action ; celui d’anahata (cœur de la poitrine) est associé au toucher, la peau étant l’organe de connaissance et l’organe d’action les mains ; Vishuddhi est associé  à l’ouie, la connaissance passe par les oreilles et l’action par les cordes vocales ; quant à Ajna, il s’appelle aussi l’œil de l’intuition ; c’est là où la conscience s’élargit et devient homogène et va permettre d’éveiller le lotus aux mille pétales (sahasrara) au centre du crâne.

Lorsque nous pratiquons les postures, nous éveillons tous ces centres. Par exemple nous nous mettons en conscience avec la gorge lorsque nous pratiquons le cobra, le poisson, la chandelle…etc

Nous développons ainsi nos sensations et pouvons ainsi mettre de la lumière sur les parties ou organes du corps entachées d’ombre.

Cette pratique liée au corps nous permet de revenir sur notre sens profond, celui de la conscience qui favorise l’éveil de l’esprit nous ramenant vers le silence intérieur :

« Ecoute le Silence, écoute l’eau, le vent,, tes pas, dans le Silence tu acceptes et tu comprends ; dans le silence, tu acceptes tout. Le Silence est la langue de l’Amour ; le Silence est la paix du moi ; le Silence est Vérité et Prière » (Vimala Thakar)

La pratique est le terreau permettant l’ouverture à soi-même et à autrui.

Beau printemps et beau week-end.